Les Intouchables : Thief
Cette évaluation est basée sur le post de Soulskill sur slashdot, post intitulé « Thief debuts to mediocre reviews » . Entendez, grosso merdo, « Thief fait ses débuts au milieu de reviews médiocres » . Je ne suis pas certain qu’il ait bien compris à quel point le titre de son post était… horriblement VRAI. Car les reviews sont médiocres. Voire pire. Elles démontrent en fait toute l’incompétence des reviewers pseudo-professionnels, joueurs du dimanche sans la moindre aptitude, sans le moindre recul, sans la moindre once d’intelligence. Bref : la parfaite démonstration de tout ce qui cloche dans le monde du pseudo-journalisme du jeu vidéo. Et après en avoir lu une bonne tranche, et joué une bonne tranche au jeu, je me suis dit qu’il était plus que temps de prendre le contrepied et de remettre l’église au milieu du village.
Si vous n’avez pas le courage de tout lire, alors lisez bien ceci : plus aucune publication, qu’elle soit en ligne ou non, n’est digne de confiance. Les deux exceptions étant Rock, Paper, Shotgun, et PC Gamer. Là. Entamons donc notre démonstration par l’absurde.
Tout d’abord, beaucoup se plaignent d’une IA complètement à la ramasse et du mode concentration. Preuve s’il en fallait encore du manque complet de compétence des reviewers, puisque ces deux problèmes se résolvent automagiquement en passant la difficulté en Maître et / ou en ajoutant des défis dans les options – tout ça est là pour une bonne raison, et la difficulté la plus haute a TOUJOURS été la seule manière valable de jouer à Thief. La diminuer a toujours fait passer les gardes pour des abrutis – rien de neuf sous le soleil, donc. Étrangement, on remarquera que cela vaut aussi pour ceux qui se prétendent fans de la première heure (chapeau bas à l’abruti de chez Gamespot – le même par ailleurs qui avait donné un 6 à Alpha Protocol pour cause de pop-in de textures principalement. Le professionnalisme incarné, vraiment).
Ensuite on a les plaintes au niveau du hub, qui – bouhouhou – est bordélique et dans lequel les points de repère sont trop peu nombreux. Je souhaite bon courage aux imbéciles heureux qui démontrent par là leur manque total de sens de l’orientation, y compris une carte à la main. Certes, c’est bordélique. Certes, c’est segmenté. Certes, il y a peu de points de repère. Est-ce gênant ? Est-ce mauvais ? Non. La Cité est ce qu’elle a toujours été – une ville semi-médiévale, et donc par définition construite n’importe comment. En fait, la chose renforce la sensation de cohésion – qui est régulièrement brisée par les zones de chargement les plus bourrines… ce qui est compensé ici et là par des passages étroits par lesquels Garrett doit se faufiler. C’est certes dommage, mais ce n’est en aucun cas une faille majeure dans le système.
Passons rapidement sur les plaintes au niveau de l’histoire. Alors que les choses soient claires. L’histoire de Thief 1, 2 et Deadly Shadows, en gros, c’est : « un grand méchant mystérieux apparaît, il pisse sur la jambe de Garrett, et Garrett sauve la Cité » . Dans le Thief qui nous intéresse ici… Euh… Ah bah c’est la même chose en fait. Ben merde alors. On a aussi ceux qui se plaignent que Garrett se voit affublé d’Erin. Soi-disant que Garrett est un solitaire et que non, y’a pas moyen. Ahem. C’est pas dans Deadly Shadows – qui suit parfaitement le canon des épisodes précédents, au passage – que Garrett adopte une petite fille, à la fin, dans les mêmes conditions qui l’ont vu se faire adopter par les Gardiens au début du premier ? Ah… Euh… Bon OK, je dois être complètement sénile alors. Oups.
On a les plaintes habituelles sur le framerate. Phénomène particulièrement visible sur consoles, beaucoup moins sur PC (même si le manque d’optimisation se fait sentir). Depuis quand exactement est-ce que la qualité au lancement d’un jeu fait partie de son évaluation ? Oui, c’est chiant. Oui, ça pourrait être mieux. NON, LE JEU N’EST PAS INJOUABLE / FOIREUX AU POINT DE NE PAS POUVOIR EN PROFITER. En fait, il faut reconnaître ce qui est : c’est mieux que pas mal de trucs sortis. Est-ce excusable ? C’est subjectif. Il est clair qu’on est pas au niveau de polish d’il y a quelques années, mais ça vaut pour TOUS les jeux. Voulez qu’on parle viteuf des merdes que pond Bethesda à longueur de temps, merdes qu’ils refusent de patcher, ce qui a pour conséquence l’apparition de patches non-officiels pour TOUTES leurs saloperies depuis Morrowind ?
On a les plaintes au niveau du level design trop restreint. Genre « ouais mais que tu prennes n’importe quel chemin t’arrives au même endroit » . Euuuuuuuuh… Quand je vais voler l’Épée de Constantine, le Sceptre de Bafford, quand je vais enlever Frère Cavador, quand je traverse le Berceau de Shalebridge… Tous les chemins mènent à la même Rome. Alors oui, les niveaux sont plus compacts. Il n’empêche. Prenons la mission 1, oui oui, celle que tout le monde a vue en let’s play, en trailer, en vidéos d’interviews et j’en passe : rien que pour la joaillerie vous avez trois entrées possibles, auxquelles mènent quatre chemins distincts (et je n’ai même pas poussé la chose dans ses retranchements).
On a aussi entendu chialer parce que les voix sont différentes et que Russell n’est plus Garrett. Là par contre, ça devient intéressant. Je vais être honnête. J’emmerde Russell. Je veux dire oui, sa voix était bonne. Mais elle n’était pas transcendante, contrairement à ce que la plupart des forumeurs et vétérans prétendent. Le plus gros des joueurs francophones vous le dira : la voix française de Garrett met une raclée à la VO avec une main dans le dos avant le café du matin. Et là… Je ne m’explique toujours pas le choix fait de changer d’acteur aussi. D’autant que sa performance laisse FRANCHEMENT à désirer. Les rôles sont inversés, et à tout dire, c’est franchement pour me déplaire. La voix française de Garrett n’a aucune intonation cynique, aucune repartie, c’est mou, ça manque de vie, bref : c’est à gerber de nullité.VOST recommandée donc – même si effectivement la VO ne vaut pas la performance de Russell NON PLUS.
On chouine aussi dans les chaumières parce que le lore des premiers opus n’est pas respecté. Ce n’est ni tout à fait vrai ni tout à fait faux. Une partie l’est. On peut par exemple supposer (âge de Garrett mis à part) qu’Erin est bien la petite fille dont il est question plus haut. De même qu’on peut tout à fait expliquer que Garrett n’ait pas pris vingt ans… Je veux dire je vois mal le perso principal, la cinquantaine tassée, se démener pour sauter par-dessus les obstacles et faire la course sur les toits. Pas que ça relève de l’impossible, mais ça commence à méchamment limiter les possibilités pour la suite, sauf à courir dans les préquels. De même, il est fait mention de l’interdiction d’anciens cultes. On peut y voir un lien avec les païens. D’autres indices traînent ici et là qui font méchamment penser à une dichotomie dans le traitement de l’Histoire du jeu : par ici on repart à zéro, par là on garde certains éléments. C’est dommage, mais on ne peut pas dire que ça flingue le jeu non plus.
Car le corps, le cœur, l’âme du jeu… c’est l’infiltration, les ombres, le souffle retenu, le stress. Et à ce jeu-là, Thief gagne à tous les coups, sur tous les tableaux. On passe très, trop facilement sur ses défauts les plus visibles, et on supporte les inévitables concessions faites aux consoles (par exemple l’ouverture de fenêtres au pied-de-biche pour cacher les zones de chargement). Pourquoi ? Parce que si l’enrobage a changé, la sucrerie au milieu est parfaitement intacte. Pour tous les vautrages en règle de Deus Ex, Thief est une parfaite réussite. Ceux qui pleurnichent sont, qu’ils le veuillent ou non – qu’ils le réalisent ou non, même – soit en pleine dissonance cognitive, soit en plein déni.
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