Bioshock 2

Bioshock 2

Me serais-je moi-même conditionné ? Parlant à Iosword de la série Bioshock, alors qu’il ne me manquait plus que le second à faire, et ayant entendu bien du mal à son propos par rapport à l’original et Infinite, je me suis dit « ça se trouve, ce sera mon préféré  » . Quelle déclaration, sachant que, de l’avis de la presse, Bioshock 1 et Infinite sont à des lieux du second. Même pas réalisé par Irrational Games ; quel médiocre projet ! Une suite commerciale ! Quelle infâme chose. Très mauvaise idée. Oulala, nanar assuré ! C’est 2K Marin qui se colle à la tâche de reprendre le flambeau et d’occuper la scène entre deux jeux de Ken Levine. Ce studio est-il à la hauteur ? Oui. Définitivement oui.

 

Reprendre le flambeau, c’est compliqué. Quand Eidos Montréal réanime la série Deus Ex avec Human Revolution, il y a un poids, une responsabilité forte, mais ils le font sept ans après un épisode décevant. Difficile de décevoir. Ici, 2K Marin le fait trois ans après le choc ; difficile de bien faire, alors ils décident que cette suite ressemblera à s’y méprendre au premier opus. Améliorations par ci, changements par là, histoire différente, et on emballe avec du multijoueur. De quoi séduire le grand public et faire hurler d’horreur les fanatiques.

On est en face d’un 1.5 vraiment assumé pour le coup. 2K Marin étant dans l’impasse de la suite commerciale, il fallait soit faire rupture pour se faire incendier par les conservateurs plutôt que par les progressistes, soit conserver et se faire incendier par les progressistes. Pour le coup, 2K mise sur la conservation de la formule Bioshock, et le fait même en apportant une structure radicalisant encore plus ce qui était déjà une partie de ce que je reprochais au premier Bioshock. Rapture est devenue un couloir avec quelques passages un peu plus complexes, mais, globalement, si le premier Bioshock offrait des morceaux d’exploration, le second est encore plus pingre en la matière.

Résultat : on gagne en rythme. Et quand je dis qu’on gagne en rythme, c’est que l’on tourne moins en rond. Le gameplay est plus dynamique, la progression du personnage est plus dirigiste, et en même temps (… je commence à faire du Macron moi ?!) plus complexe. Bioshock 2 cherche à aller plus vite, et à faire les choses avec plus d’efficacité. Pour le coup, au début, ce 1.5 plus pragmatique a de quoi gaver les joueurs, surtout quand, comme moi, on se bouffe dans la foulée le premier, puis le second. Mais, il faut bien dire que ce rythme radicalement différent rend l’aventure beaucoup plus plaisante à parcourir, et on finira ce second opus un peu plus rapidement que le précédent, mais aussi avec davantage de satisfaction.

Rapture ne perd rien de sa superbe, et si ce second opus troque malheureusement l’ambitieuse direction artistique du premier, c’est pour mieux s’assurer des décors un peu plus variés et techniquement plus fournis d’effets visuels ambitieux tout le long. Si le premier Bioshock était en effet magnifique, Bioshock 2 l’est tout autant, mais différemment, bien que les décors soient globalement moins marquants. Une poignée d’entre eux laisse tout de même d’impérissables souvenirs, comme la première virée dans l’extérieur des bâtiments de Rapture, qui donne alors toute la portée du gigantesque projet d’Andrew Ryan, ainsi que toute son absurdité.

Visuellement, Bioshock 2 offre également des modélisations décentes de visages, et troque le rendu poupin des autres Bioshock pour des visages que l’on acceptera bien plus aisément. Globalement, c’est quand même très satisfaisant, et 2K Marin semble avoir fait du mieux qu’il pouvait, sans pour autant avoir les artistes du studio Irrational. Niveau framerate sur la version rétrocompatible Xbox One, le fait qu’il y ait de nouveaux effets graphiques affecte pas mal les performances, sans pour autant rendre cette version moins bonne que l’originale sur 360. On appréciera ou non le framerate qui oscille entre le 50 et le 35 images par seconde, ou bien on choisira de le verrouiller à 30. Personnellement je ne crache pas sur une fluidité supplémentaire qui, selon moi, améliore le rendu visuel.

Niveau musique, c’est Gary Schyman qui signe une nouvelle fois la soundtrack, et fait ici un travail bien différent du premier ; moins ambiantes, les musiques sont bien plus agréables à l’oreille pour une écoute indépendante, et font donc un travail que j’apprécie bien plus. Je vous offre d’ailleurs le plaisir d’écouter le main theme du jeu qui est vraiment réussi, et colle particulièrement bien aux aventures de Delta. Le doublage est une nouvelle de très bonne facture, et on se retape sans déplaisir une grande partie des bruitages du premier opus.

 

Gary Schyman Bioshock 2; Pairbond

 

Maintenant, c’est le moment où je dis que le gameplay est plutôt correct, parce qu’en fait, le gameplay, c’est ça. Bon, on peut chipoter et dire qu’il est désormais possible d’attaquer au corps-à-corps avec toutes les armes, et que, globalement, c’est quand même bien mieux côté gamefeel avec des pétoires qui ont du vrai punch. L’ennui avec ce jeu, c’est qu’il ne va pas au bout des choses avec son dynamisme en ne permettant pas au joueur de courir, ce qui est ballot quand ton histoire est plus dynamique, quand tous les ennemis sont plus rapides, et lorsque tu orientes clairement les nouveautés vers un jeu plus rapide.

Enfin, on peut faire la liste des nouveautés : nouveaux plasmides, nouvelles armes, nouveaux type de gameplay avec des séquences originales, et une série de corrections qui parleront à ceux qui auront parcouru le premier de long en large et en travers (… les mini-jeux beaucoup plus simples et moins intrusifs). Évidemment, c’est toujours un jeu qui ne coupe que peu l’action et ne force presque jamais à passer par des menus pour se parcourir. De ce côté, la formule Bioshock fonctionne encore mieux, et ce n’est pas pour me déplaire, d’autant que contrairement à ce que je pensais, le jeu a quelque chose à raconter.

On vit enfin la chute d’une Rapture qui nous est un peu plus expliqué ici, tout comme le focus sur un conflit politique ayant divisé une cité qui basait toute sa force sur l’individualité de chacun. Avec la naissance d’une nouvelle idéologie à Rapture, elle s’est scindée en deux camps qui ont irrémédiablement mis en danger son unité. Amusant paradoxe. Le jeu met ainsi en avant deux nouveaux personnages et un nouvel antagoniste qui mise la majeure partie de son charisme sur sa présence à l’écran très faible, bien qu’il soit omniprésent dans la narration environnementale ou par le biais de l’enjeu du héros. Cet enjeu est d’ailleurs beaucoup moins flou que celui du premier épisode, qui se résumait à : « Obéissez, je vous prie  » . Nettement plus terre à terre.

Le protagoniste, Delta, qui est un protecteur, passe le jeu à ne pas décrocher la moindre parole et à se retrouver dans des situations où il a l’occasion de soit confirmer son statut de machine, de « chose  » , ou au contraire de s’humaniser, comme la relation qu’il entretenait avec sa petite sœur le suggérait. Ce nouvel angle donne aux actions du héros un sens, et l’exploitation (… ou non) des petites sœurs rencontrées en cours de jeu est :

  1. Plus justifiée que dans le premier, tout comme la bonne ou la mauvaise fin.
  2. Plus intéressant sur le plan du gameplay, car on leur permet de faire ce qu’elles ont à faire, en donnant lieu à des séquences de protection, variant un peu la boucle de gameplay.

Ici, nos actions ne sont pas juste là pour influer sur le destin de petites sœurs qui, dans le premier opus, n’avaient que peu d’occasion de tisser des liens avec le héros. Ici, comme nous avons un rôle de protecteur, le lien est plus concret, et le comportement du joueur vis-à-vis de ces petites sœurs a une incidence sur la vision qu’aura sa petite sœur originelle, qui s’orientera alors plutôt vers un profil violent ou non-violent selon nos choix. Les actions du personnage ont de véritables conséquences sur les trois fins du jeu, et c’est tant mieux, parce qu’elles sont toutes intéressantes et bien plus abouties que celle du premier titre.

Et vous savez quoi ? L’histoire de Bioshock 2 est moins poussive et plus attachante que celle du premier opus et d’Infinite. C’est con hein, mais en posant une histoire moins alambiquée, en proposant un antagoniste plus humain et moins grand guignolesque (le PUTAIN DE BOSS DE FIN DE BIOSHOCK PREMIER DU NOM, QU’EST-CE QUE C’EST QUE CETTE MERDE ?!), avec quelques séquences émotionnellement assez chargées, ainsi qu’une conclusion vraiment satisfaisante, et un protagoniste pour lequel on ressent enfin quelque chose sans qu’il ait besoin de moufter quoi que ce soit… Bah voilà.

Alors, oui, le héros du premier ne disait rien non plus… Mais on s’en foutait de lui ; on ne s’y identifiait pas vraiment, vu qu’on était catapulté dans Rapture comme lui l’était. Certes, on était dans un personnage tout à fait vierge, mais on se fichait bien de ce qui lui arrivait. Là, le Delta, il nous laisse de la place, bien que, paradoxalement, il soit ancré dans l’univers de Bioshock d’une façon bien plus concrète ; on ressent quelque chose pour ce qui lui arrive. Cela fonctionne mieux, l’histoire est plus facile à suivre, l’univers est toujours intéressant, les personnages sont loin d’être creux, c’est plus dynamique, et on a vraiment l’impression de faire corps avec les objectifs de notre personnage, tout simplement parce qu’on veut protéger la petite fille originelle.

Donc voilà, quitte à faire bondir, je trouve qu’en se concentrant sur quelque chose de plus simple, tout en conservant la richesse de l’univers, Bioshock 2 fait un meilleur taff du côté de l’histoire, tout en préservant l’immersion en Rapture intacte. Et si on fait l’addition de tout ce qui va mieux dans cet opus, et qu’on se rend compte qu’il gomme une partie des défauts du premier en se concentrant uniquement sur un rythme plus soutenu et un gameplay plus bourrin et jouissif… Bah, qu’est-ce que vous voulez de plus ? On n’incarne plus un no name qui est descendu du ciel en avion, mais un protecteur qui n’a pas deux mains, mais une main, et une putain de foreuse. UNE FOREUSE, oui, tu as bien lu.

Donc voilà, il est peut-être plus oubliable parce que c’est une suite qui ne prend pas de risque, et qu’il n’y a pas d’effet de surprise, mais il est plus efficace, plus rythmé, plus abouti côté mécaniques de jeu… Et pourtant, il a un mode multijoueur qui est souvent le signe de l’arrivée de problèmes pour une licence originellement solo (… Mass Effect 3, Dragon Age Inquisition, Dead Space 3 ; merde, que des jeux EA !). Comme quoi, parfois les choses sont vraiment bien faites.

 

Si vous avez aimé Bioshock, et pas trop Infinite, faites le second. Il est, selon moi, non pas le meilleur de la trilogie (… bon, si, je le pense un peu), mais le plus équilibré, le plus dynamique, et le moins imparfait dans sa construction. On pourra lui reprocher de ne pas changer le monde, mais au moins, il fait ce qu’il a l’intention de faire avec grande efficacité sans jamais péter plus haut que son cul. Loin d’être décevant comme Infinite, mais sans doute moins marquant que Bioshock, le seul moyen qu’il vous reste pour le départager de son aîné, c’est d’y jouer. Alors, jouez-y ; ça ne vous coûtera plus grand chose désormais.

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A propos de l'auteur : Marcheur

Enfant attardé de Kreia et d’Alfred de Musset. Pense que tout est narration, et répète sans cesse qu’il donne tout en dansant comme un ouf

14 Commentaires sur “Bioshock 2”

  1. Ninheve dit :

    Je fais partie de ceux qui ont aimé les 3 bioshocks. Mais il est vrai que dans mon esprit je mélange le premier avec le second. Le deuxième est plus un opus 1.5 que 2 …et j’ai vraiment aimé Infinite…donc peut etre que je ne suis pas normale :p

  2. Marcheur dit :

    Moi je ne mélange aucun des trois en l’occurrence  » />
    Disons qu’Infinite… c’est pas que je ne l’aime pas en fait, c’est juste que je le trouve très aléatoire, du génie au ridicule il est constamment en train de marcher sur un fil et il lui arrive très fréquemment de juste faire n’importe quoi, ce qui m’attriste dans la mesure où le duo Booker / Elizabeth est diablement efficace et donne au jeu une vraie dynamique. Mais ça compensera jamais la découverte de Rapture et le rythme tambour battant de Bioshock 2, j’aime les 3, mais je trouve que le second reste sans doute le meilleur compromis vu que Bioshock 1 m’a laissé un goût de « pas assez » dans l’exploration de Rapture, et Infinite un goût de pas assez dans son écriture globale.

    En réalité, je préfère vraiment les deux add-ons de Infinite au jeu en lui même, et le gameplay de Bioshock 2 ainsi que son rythme surpasse le premier à mon sens, donc je ne sais que dire, chose sûre : Infinite est à mon sens le moins bon

  3. agrooty dit :

    J’aime les 3 aussi,et je viens de recommencer la trilogie, mais après la lecture du roman. Du coup cela donne une autre image du premier  » />

  4. Toupilitou dit :

    J’aime les 3 aussi,et je viens de recommencer la trilogie, mais après la lecture du roman. Du coup cela donne une autre image du premier  » />

    Je ne savais même pas qu’il y avait eu un roman ; ça se lit bien ?

  5. agrooty dit :

    Oui très bien, je dis pas que c’est un super bouquin, mais je l’ai bien apprécié. Il raconte la construction et les 10 premières années de Rapture.

  6. Marcheur dit :

    Pour le coup ça a l’air d’être un super complément aux DLC d’Infinite, vu qu’il se passe dans les « belles » années de Rapture… le moment où la décadence n’a pas amené au transhumanisme et autres conneries qui amènent au premier Bioshock.

  7. Mickey dit :

    Je me rend compte qu’il serait temps que j’arrête de cumuler les jeux en ne finissant pas les anciens que j’ai…
    J’ai découvert Bioshock via Infinite, que je n’ai pas terminé, et j’ai attaqué le premier opus bien plus tard(que je n’ai pas terminé )
    Le fait qu’un roman existe est bon à savoir, à défaut, ça pourrait être un bon moyen pour moi me pousser à retourner finir les jeux!

  8. Ninheve dit :

    Ah mais j’ai préféré Bioshock 2 au 1 mais en terme de jeu infinite était finalement celui qui était le plus différent du groupe..;le 1 et le 2 sont basés (sans jeu de mot) sur des univers et un gameplay très similaires :p

  9. Bioshock 1 est un jeu à part pour moi, tout simplement parce que c’est le seul jeu qui m’a fait pleurer. Des larmes. Des vraies.

    Maintenant, concernant le gameplay, la possibilité de gérer plasmide et arme dans le 2 paraît tellement évidente que c’en est difficile de se refaire au gameplay du 1er.

    Infinite est une tuerie avec une fin MEMORABLE (ça m’a retourné). J’ai adoré.

  10. Marcheur dit :

    Il t’a carrément fait pleurer le premier ? Woaw, je sais pas trop comment il a fait mais chapeau à lui ^^
    Niveau gameplay le second est vraiment au dessus du lot, le plus souple, le plus sympa à prendre en main, un vrai plaisir à jouer. Infinite aussi est très bon sur ce plan, mais le coup des dimensions bordel ça m’a complètement refroidi alors que la dynamique Elizabeth / Booker est au dessus de bien d’autres jeux narratifs.

    Tu as fait le tombeau sous marin d’ailleurs ? Y a moyen que ça t’arrache une larme aussi

  11. LeOFr dit :

    Ma réaction quand j’ai terminé Bioshock Infinite:
    https://imgur.com/a/GDti1

    Sinon j’ai commencé le premier j’ai toujours pas fini. Et jamais fait le 2 pourtant je l’ai.

  12. Marcheur dit :

    LEOfr : je crois avoir eu cette réaction lorsque j’ai fini MGS V… pendant environ un mois… brutale période de ma vie  » />

  13. LeOFr dit :

    Promis à mon retour du Canada je m’y met à MGS V aussi, que je possède également…

  14. La fin du 1er, quand tu as fait le choix de sauver toutes les petites sœurs, m’a vraiment ému.
    J’ai trouvé ça magnifique.


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