Botanicula
J’aime bien les Point’n Click. Bouleversante déclaration, je vous l’accorde, et qui plus est, d’une folle originalité. Oui, mais je les aime surtout lorsqu’ils sortent du lot. Étonnamment, alors que l’on pourrait s’imaginer que le gameplay des jeux de ce genre pourraient se scléroser en raison de mécaniques relativement simples et de puzzles déjà vus et revus, le Point’n Click se renouvelle sans cesse. Et les Tchèques d’Amanita Design, à qui l’on doit également Machinarium ou Samorost, ont bel et bien décidé de ne pas se reposer sur leurs lauriers et de nous proposer quelque chose de… différent. Mais, originalité ne rime pas toujours avec fun ; est-ce le cas avec Botanicula ? C’est ce que nous allons voir ensemble. C’est parti !
Nous voilà donc dans le monde macroscopique de Botanicula, rapidement présenté dans l’introduction comme étant en danger. En effet, des créatures s’apparentant à des araignées vampirisent la sève des arbres, détruisant ainsi tout l’écosystème qui lui est associé. En l’occurrence, personne ne dispose de la force nécessaire pour lutter contre ces monstres, et tous les habitants de l’arbre les fuient à vue d’œil. Très vite, nous allons prendre en main non pas un avatar, mais cinq d’un coup, et qui se déplaceront tous en bloc, sans distinction. Leur mission : réaliser la vision perçue par l’un d’entre eux, consistant à sauver leur arbre du danger de mort qui le guette, en plantant en terre ce qui semble être le cœur de ce monde miniature, à savoir, une graine.
Mais qui dirigerons-nous exactement ? Dans un premier temps, le protagoniste principal, une sorte de petit bulbe sur patte, absorbe la fameuse graine qui lui procure la vision prophétique. A l’instar de nombreuses aventures épiques, notre héros aura des compagnons : une branche d’arbre ayant la capacité d’étendre ses brindilles, un champignon pouvant rétracter son pied dans son chapeau, une espèce de machin volant, un autre type de champignon plus massif et résistant pouvant relâcher des spores. Les capacités de tous les protagonistes se déclencheront plus ou moins automatiquement selon l’objet ou la créature avec laquelle nous interagissons.
Lorsque nous arrivons sur un tableau, nous n’aurons pas la possibilité de nous y déplacer à l’envie, et nous serons positionnés à un endroit fixe. Nous pourrons uniquement choisir d’interagir avec certains objets et créatures lorsque cela est possible, et de se déplacer sur un autre tableau via des flèches directionnelles. Les différentes interactions permettront de résoudre des puzzles, mais pas que ! Amanita Design a eu le bon goût d’intégrer un nombre incalculable de petits détails facultatifs (… et donc indispensables). Et bien souvent, en insistant plusieurs fois sur le même élément, différentes réactions amusantes seront observées.
Et c’est là toute la force de Botanicula ! Toutes ces interactions amènent de la vie et une âme à ce jeu ; le joueur est à cheval entre de la pure contemplation passive et de la réflexion dans la résolution des puzzles permettant d’avancer dans l’histoire. En parlant de contemplation, il faut avouer que nos amis Tchèques ont une sacré touche en ce qui concerne la direction artistique. Chaque tableau mélange habilement de nombreuses couleurs flattant admirablement la rétine. Par ailleurs, tous les designs de créatures débordent d’originalité ; je me suis souvent retrouvé avec un sourire amusé par le look de l’une d’entre elles.
Quant aux puzzles, oubliez immédiatement les traditionnelles combinaisons tordues d’objets divers et variés que l’on retrouve dans les poncifs du Point’n Click. Vous n’allez clairement pas vous faire une entorse au neurone en essayant de les résoudre, puisque cela repose sur de la logique pure, et un tout petit peu de réflexion. Nos cinq bestioles n’ont pas de carte, pas de système d’indices, pas de journal de quêtes, pas de feuille de personnage ; à vous de vagabonder pour continuer à avancer. En effet, pour s’y retrouver dans les multiples allers-retours, dessiner une petite carte à côté afin de retrouver facilement son chemin peut aider.
Le fait de refaire plusieurs fois le même trajet dans tous les sens peut sembler en premier lieu quelque peu rébarbatif, mais il n’en est rien puisque les tableaux peuvent s’enchaîner très rapidement si l’on souhaite. Par ailleurs, après avoir effectué des actions dans un tableau, y revenir plus tard permet de voir les changements effectués sur l’environnement ; par exemple, si vous faites éclore tous les œufs d’une colonie de bidules qui volent, le tableau restera nettement plus peuplé et animé qu’auparavant.
Côté narration, il n’y aura pas la moindre ligne de dialogue – vous avez déjà croisé un bulbe ou un champignon qui parle ? – mais cela se passe d’une manière totalement fluide via des cinématiques et des petites animations. Si votre objectif pour avancer sera de trouver un genre de volaille, alors il y aura une explication visuelle rythmée par des bruitages. Tout se déroulera de manière intuitive par des moyens détournés, et bien qu’il ne soit pas pris par la main, le joueur n’est finalement jamais perdu.
L’aspect sonore est également excellent, accompagnant tout aussi naturellement cet univers à l’esthétique totalement barrée ; la musique, omniprésente sans être envahissante, ajoute une couche de féérique à l’ensemble, tandis que les bruitages nous ramènent à quelque chose de plus léger. Tout au plus, on pourrait reprocher à Botanicula sa durée de vie – ne dépassant pas les quatre heures – et son manque de rejouabilité, mais il n’en reste pas moins véritablement complet.
La pépite d’Amanita Design est finalement un peu comme un bon shot de vodka ; on le boit super rapidement, mais on le déguste par tous ses aspects, tant dans sa direction artistique que par son level design, en passant par la créativité qui transpire par toutes ses pores. L’histoire en elle-même ne brille pas par son originalité, mais plutôt par la manière dont elle est amenée. Pour peu que vous arriviez à rentrer dans ce trip sous acides, il laissera à coup sûr une marque indélébile dans votre vie de gamer.
A propos de l'auteur : Toupilitou
Un commentaire sur “Botanicula”
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Dans le même délire, je recommande « Machinarium » et plus récemment « Fire ».