Battleborn
Je suis quelqu’un de bien, et si j’en avais eu le pouvoir, je serais retourné des années en arrière pour annuler le projet Battleborn. Vraiment, un ensemble de mauvaises décisions poussées par des tendances de marché qui ne sont clairement pas bien identifiées par un éditeur s’étant pourtant complètement planté avec Evolve, et qui recommence ici avec brio. Le titre n’est pas forcément mauvais, mais il est juste complètement impersonnel, et ne donne pas envie de s’y adonner passée la première dizaine d’heures. Pour un jeu multijoueur, c’est quand même grave.
Quelle introduction débile vais je pouvoir faire aujourd’hui…
Marcheur a le pouvoir de remonter le temps sans subir l’écriture d’un gars de chez Dontnod. Il va tenter de sauver le futur de 2K Games et de leurs nouvelles licences :
Investisseur : Comment êtes vous arrivé ici ? Vous êtes le directeur créatif ?
Marcheur : On a vraiment pas le temps les gars… Vous êtes bien de 2K et ça va parler de Battleborn ici, hein ?
Directeur créatif : Euh… oui mais nous n’avons pas encore communiqué le nom du projet, on parlait d’Evolve là.
Marcheur : Oh merde. Sérieusement les gars, faites d’une pierre deux coups : annulez les deux titres et passez à autre chose. Dans un futur pas si lointain, vos deux nouvelles licences, c’est un four complet. On a oublié Evolve un mois après sa sortie et il a fini free to play. Battleborn, c’est pire, il est descendu à dix balles deux mois après sa sortie ! C’est même plus un four ; je n’ai pas de mots pour ça. Faut tout annuler au plus vite !
Directeur créatif : Dans le futur les nouvelles licences n’ont pas de succès ?
Marcheur : Mis à part les nouvelles licences qui repompent tout sur la concurrence et bénéficie d’une campagne publicitaire à base de « ceci est révolutionnaire. » Non aucune avec de vrais nouveaux concepts de gameplay ne perce.
Investisseur : Vous pouvez définir « gameplay » ?
Marcheur : Cela prendrait trop de temps. Sérieusement les mecs, ne financez pas ces deux projets ; ça va alimenter les trolls et je suis pas sûr qu’ils aient torts. Encore pour Evolve, sortez-le avec un minimum de contenu et évitez les deux season pass plus les DLC cosmétiques. Ça le sauvera peut-être un peu. Mais Battleborn, il faut oublier. Vous êtes un membre de Gearbox ?
Directeur Créatif : Ouais, pourquoi ?
Marcheur : Tu peux danser comme Clap-Trap pour moi ?
Bon je vous passe les détails, mais sachez qu’on a dansé tous les deux comme des dingues avant d’être viré par la sécurité. Le directeur créatif a été remplacé par le balayeur, ce qui explique le résultat que l’on connaît. Avec du recul, je me sens un peu coupable d’avoir saboté le projet Battleborn, car c’est moi qui ait empêché le bon déroulement du processus créatif en faisant virer le créateur de la licence, et en la laissant se faire développer par un mec qui n’y connaissait rien. Faut dire que c’était super drôle de voir monsieur Randy Varnell hurler dans la salle de réunion « Mâte un peu mec j’donne tout ! J’donne tout et j’danse comme un ouf ! » alors que les investisseurs appelaient la sécurité.
Plus sérieusement, nous allons revenir à un développement plus classique du propos. Je ne suis pas retourné dans le temps (… twist improbable) et le directeur créatif a bien développé le titre. Je ne sais pas ce qu’il s’est passé le jour du brainstorming, Turtle Rock Studios et Gearbox Software semblent s’être mis d’accord pour échouer dans l’installation de deux nouvelles licences basées sur du multijoueur. 2K Games a désormais toutes les raisons de croire qu’on ne peut pas imposer de nouvelles franchises sans avoir recours à un studio disposant déjà d’un grand palmarès ; on risque donc de bouffer du Borderlands, et Turtle Rock Studios vont devoir faire des pieds et des mains pour créer une licence plus lucrative.
Mais alors, Battleborn, bide mérité, ou cruel coup du sort ?
Un jeu sans ambition
Nota Bene : Il n’y aura guère plus de latin dans ce texte mais je tiens à prévenir d’avance tous les lecteurs. Le titre ici présent nécessite une connexion internet même pour son mode solo. Cela aurait pu encore être tolérable si le jeu ne subissait pas d’atroce lag dès que votre connexion flanche un peu. Oui, vous et les IA lag lorsqu’il n’y a pas de connexion. Vous êtes prévenu de l’horreur désormais.
Alors que vient faire le jeune Battleborn dans le paysage ludique ? Il le dit lui même « je suis un shooter inspiré des MOBA « . Ah bon, et donc tu veux proposer une alternative dans un marché encore plus fermé que le monde du MMORPG, c’est ça ? Partant de ce constat, difficile de ne pas ricaner lorsque Battleborn arrive dans l’arène, affichant fièrement un « par les créateurs de Borderlands » qui ne fait que confirmer son incompréhension du marché dans lequel il se lance. Battleborn n’a pas le temps de s’élancer qu’un mur lui bloque déjà le chemin en lui disant non. Et ledit titre va t-il se débattre pour essayer de percer, ou même tenter de faire du bruit afin de se faire remarquer ? Non. Parce que Overwatch développé par Blizzard sort peu de temps après et n’a aucun mur face à lui… parce qu’il est écrit Blizzard sur le boîtier. Là est toute la douloureuse différence.
Pourtant, Battleborn est différent de son concurrent. Il propose, contrairement à celui-ci, une campagne jouable en solo, un mode coopération en écran splitté, et possède globalement l’identité propre à Gearbox depuis le lancement de Borderlands. Coloré et alourdi par un humour potache qui ne fait rire qu’une fois sur dix (… ratio médiocre), sans posséder le côté décalé de la saga phare de Gearbox. Difficile pourtant de ne pas voir de vraies qualités dans le jeu du studio. Pour commencer, il y a du coop local, et ça, c’est très bien. Il y a aussi une campagne qui propose un challenge relevé, ainsi que huit missions pas trop rébarbatives (… elles le sont, mais il y a largement pire).
Les personnages sont aussi au nombre assez conséquent de vingt-cinq, s’avèrent assez variés, mais souffrent tout de même d’un gros déséquilibrage qui fait plafonner certains personnages dans beaucoup de situations, rendant certains complètement pétés, et d’autres à la rue. Point positif, le jeu prévient le joueur en fonction du personnage et de la mission choisie s’il est conseillé de parcourir le niveau avec cet avatar. Une mise en garde habile et appréciable qui compense le manque d’équilibrage en solo. Mais en multi ?
Le multijoueur n’est guère peuplé, et quand il l’est, c’est par des machines de guerre rodées qui ne perdront pas. Non, ils ne perdront pas. Vous allez mourir dans d’atroces souffrances, et vous supplierez l’univers de vous achever le plus rapidement possible. Même pas la peine d’essayer de se faire les crocs sur le solo, ça n’a juste rien à voir. A la vitesse effrayante à laquelle le multijoueur se vide, même pas la peine de seulement espérer jouer en ligne, un comble pour un jeu qui mise tout sur cela, ou presque.
Résultat, le système d’évolution, bien qu’agréable et fonctionnel, n’est pas vraiment satisfaisant car pensé sur le long terme. Et le long terme dans un futur très proche pour Battleborn, c’est refaire encore et encore une campagne qui vous occupera de cinq à dix heures selon votre maîtrise. La seule chance de pouvoir profiter du jeu un jour ? Attendre son passage en free to play, état qu’il partagera avec Evolve. Mais si vous savez, le jeu dont je parlais dans l’intro inutilement longue du début de cette critique.
Alors le feeling, comment est-il ? Très variable, et globalement très médiocre pour un FPS. Un drôle de défaut pour un shooter, mais aussi une habitude lorsqu’on connaît le manque de maîtrise en la matière de Gearbox Software (… Borderlands n’est guère exemplaire là-dessus). On saluera quelques performances honorables offrant un game feel plus agréable que la moyenne, mais peu de réussite pour un jeu qui mise sur sa variété, bien réelle en l’état, mais aussi très peu satisfaisante. Alors, la question qui fâche pour ma part c’est « Est-ce que j’aime jouer à Battleborn ? » Oui, j’aime beaucoup, mais le problème est que j’ai conscience du caractère très éphémère du titre ; il va disparaître dans quelques mois, et c’est dommage.
Dommage, comme ces défauts de lisibilité, cette narration énervante et vide, doublée d’une écriture assez horripilante ; on tartine le titre de blagues en espérant que quelques-unes marchent. Il y a (… pour sa défense) quelques pépites dans le lot, mais rien de significatif qui sauvera les meubles, la maison étant déjà composée de braises qui luisent à peine. On pourra signaler un contenu multijoueur chiche, mais comme je l’ai dit : il n’y a pas de joueurs, que des robots assassins. Comment voulez-vous en voir le bout si vous mourez toutes les cinq secondes ?
Le pire, c’est qu’il est même pas laid
Battleborn est un jeu réalisé sous… Non non, je refuse de l’écrire une quarantième fois. Un moteur déjà maintes fois utilisé lors de la septième génération, et qui subit en plus de cela une limitation à 30 fps, alors que c’est plutôt comment dire… médiocre techniquement ? Cela fait le travail. Là n’est pas le problème. Mais, dans le même mois, était sorti DOOM. Et DOOM était en 60 images seconde. Donc voilà, un jeu plus laid qui est moins fluide qu’un jeu plus beau, comprenez le malaise.
Malaise qui se relativise grâce à une direction artistique correcte, faisant oublier l’immondice d’Overwatch et ses personnages atroces. Oui, je trouve Overwatch immonde. Cc’est mon problème, pas le vôtre, mais revenons en à Battleborn. Il possède en plus de toutes ces multiples qualités techniques (rires) des effets très pauvres et des textures très brouillonnes, trahissant un développement prévu originellement sur Xbox 360 et PS3. Je ne vois aucune autre raison valable pour justifier cette médiocrité.
Ah… il fallait que j’en parle : le jeu essaye de réitérer la réussite de Borderlands 2 au niveau de son introduction fracassante, avec la musique de The Heavy, Short change the hero, que je ne peux m’empêcher de partager ici :
The Heavy : Short change the hero
Et le résultat de cette introduction en dessin-animé (… comme une grosse partie de la narration du jeu) est un grand moment de gêne. Oui, c’est gênant de regarder pendant de très longues minutes Gearbox se ridiculiser, après avoir fait preuve de tant de maîtrise et de goût pour le second épisode de la saga Borderlands. Pourtant, la musique fait le taff. Bon le rappeur a un très faible niveau selon moi, mais c’est ainsi ; c’est juste que l’animation est très laide, peu fluide, et simplement pas porteuse d’une quelconque émotion. C’est très froid.
Pour ce qui est de la musique, je suis au malheur d’avouer n’avoir rien à en dire. C’est aussi très impersonnel, malgré ce qu’essaye d’instaurer le jeu avec son visuel en termes d’identité. Les doublages sont, pour le coup, assez correctes ce qui n’est pas surprenant venant d’une VF (… oui oui, les VF sont de très bonnes qualités globalement, Two Worlds II, Metal Gear Solid premier du nom, et d’autres sont des exceptions, pas la règle) ; les comédiens du doublage ont fait un bon travail. Dommage que les bruitages manquent de percutant, mais une nouvelle fois, nous étions prévenus (Borderlands).
Alors, Battleborn ? Si j’étais anglophone je dirais surement meh, mais je suis français et je dis mouais. Pour le prix auquel je l’ai eu, ça va, mais pour ceux qui l’ont acheté au lancement en croyant au projet, j’ai sérieusement les boules pour eux, parce que ce Battleborn n’a aucun avenir… ou son avenir sera dans le free to play car en l’état, c’est la débandade. Personne ne semble en vouloir, même à dix euros, ce qui veut dire bien des choses. A force de miser sur le multijoueur uniquement, et parier sur un secteur saturé qui ne se renouvelle que par le biais de licence « originale « , sortie par de grands studios qui n’ont d’originalité que leurs titres, 2K met en danger ses finances et ses développeurs. Je ne dis pas qu’il ne faut pas sortir de nouvelles licences, mais il faut arrêter d’essayer de forcer un marché saturé à accueillir un nouveau représentant d’un genre déjà surreprésenté, dont aucun des pratiquants ne demandent un renouvellement. Faites une nouvelle licence de jeu solo, bordel, ou faites un jeu multijoueur original !
Tags 2K GamesGearbox SoftwarePCPlaystation 4ReviewTurtle Rock StudiosXbox One
A propos de l'auteur : Marcheur
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